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Accueil de la bibliothèque > Dix écrits de Richard Wagner Dix écrits de Richard Wagner - Avant-propos (1/4) > Avant-propos (1/4)

AVANT-PROPOS

La France traverse actuellement une période d'élaboration. De toutes parts, éclatent les singuliers et profonds changements qui s'opèrent dans les manières de penser; comme aussi les tendances à jeter les bases de nouvelles croyances. Et c'est, pour tout être pensif, un émouvant et magnifique spectacle que de voir l'élite du pays travailler avec vigueur; fermeté et constance à l'instauration de notre Science et de notre Art futurs.

Est-elle prochaine la solution résultante de ces nobles efforts? Oui, semble-t-il. Ce qui le fait présager, c'est d'abord la nouvelle conception du monde que nous commençons à avoir ; c'est ensuite l'accumulation des matériaux propres à édifier un Art original et vraiment national.

Parmi ces matériaux, il en est un dont l'importance est extrême : l'Art de Richard Wagner. Dans sa Littérature de tout à l'heure, Ch. Morice a écrit : «... Inutile aussi d'affirmer de quel précieux et grave poids la pensée wagnérienne pèse et toujours plus pèsera, féconde, sur les esprits engagés dans la voie lumineuse. » Sur ce point, je partage entièrement l'opinion de cet éloquent et érudit écrivain ; je crois que les œuvres poétiques, musicales et théoriques du Maître auront une influence de plus en plus salutaire sur tes productions de nos artistes. Au reste, cette influence, chacun a déjà pu la constater en littérature et en musique. Je me bornerai à citer Charles Baudelaire, J. K. Huysmans, Stéphane Mallarmé, Catulle Mendès, Paul Verlaine, Villiers de l'Isle Adam, Georges Bizet, Alfred Bruneau, Camille Erlanger, César Franck, Vincent d'Indy, tous poètes, tous révélateurs de l'Idéal,

...l'Idéal cette amour insensée,
Qui sur tous les amours plane éternellement !

Par une incroyable bizarrerie, il est arrivé que le public français possède sur les écrits de Wagner des centaines, que dis-je ?... des milliers d'amples commentaires, d'inintelligibles gloses, d'interminables exégèses, de savantissimes dissertations, tandis que ces écrits eux-mêmes — pourtant, qu'est-ce qui importe davantage ? — il les ignore pour la plupart, faute de traductions. C'est le cas plus que jamais d'alléguer l'apophtegme de Montaigne : « Le monde regorge de commentaires, mais d'auteurs, il en est grand chierté. »

MM. Camille Benoît, Charles Nuitter, Maurice Kufferath et principalement Louis-Pilate de Brinn'Gaubast ont combattu ce mal magnifiquement. Affligé, à l'instar de ces vulgarisateurs, de la grande pénurie des textes wagnériens, j'ai ambitionné comme eux de la faire cesser. Aussi, avant de publier les esquisses dramatiques du Poète-Musicien, que j'ai traduites, ai-je voulu ressusciter les articles naïfs et malins, légers et profonds, toujours extrêmement remarquables, qu'il écrivit de 1840 à 1842, pendant son premier séjour en France, pour la Revue et Gazette musicale de Paris.

La disparition, dès 1881, de la Gazette musicale a rendu rarissime, sinon introuvable, la collection des numéros de cette publication. Depuis longtemps, d'enthousiastes amis, qui m'en savaient possesseur, m'avaient incité à faire revivre ces belles pages. J'ai enfin cédé à leurs sollicitations, fermement convaincu de l'utilité d'une telle vulgarisation, encouragé d'ailleurs dans cette tâche par l'amène bienveillance de Mme Wagner à qui j'adresse ici mea infinis remerciements.

Humble déterreur d'articles, mon unique but, en faisant paraître ce livre, a donc été — je tiens à cette déclaration — de jeter un vif rayon de soleil sur l'admirable, grandiose et dominatrice figure d'un surhumain; dont plusieurs linéaments sont encore obscurs, et de contribuer, certes indirectement, mais de contribuer cependant à l'édification du futur Art français.

* * *

Il existe d'innombrables biographies du maître de Bayreuth. Retracer sa vie de 1839 à 1842 serait donc tout à fait superflu. ]e m'attacherai simplement à énumérer en bref certains faits cardinaux, indispensables à la nette compréhension de ce volume.

Désireux de se mêler au monde artistique, de courir fortune et d'acquérir de la gloire, Wagner, ayant abandonné ses fonctions de premier Musikdirector du théâtre de Riga, arriva à Paris, au mois de septembre 1839, avec sa. jeune et vénuste femme, Wilhelmine Planer, et un magnifique terre-neuve obéissant au nom. de Robber. « Absolument sans ressources et avec une connaissance à peine suffisante de la langue française » (1), mais le cœur gonflé d'espérance, il s'installa dans une maison pauvrement meublée de la rue de la Tonnellerie. La Défense d'aimer et les deux premiers actes de Riensi composaient son bagage musical. Grâce aux lettres de recommandation de Meyerbeer avec qui il avait contracté amitié à Boulogne-sur-Mer, le nouveau venu entra sur l'heure en liaison avec Anténor Jolly, directeur de la Renaissance, Léon Pillet, directeur de l'Opéra, Habeneck et l'éditeur Schlesinger. Il reçut même de ces hommes puissants l'accueil qu'on devait au protégé de l'illustre compositeur dont les œuvres, en ce temps-là, possédaient avec despotisme le public. Il offrit aussitôt sa Défense d'aimer au théâtre de la Renaissance. L'opéra fut accepté, et Dumersan, le vaudevilliste à l'imagination si féconde, fut chargé d'en faire la traduction et l'arrangement. Par conséquent, tout s'annonçait sous les plus heureux auspices et « promettait le meilleur succès (2) ».Wagner était ravi au troisième ciel. Certain de la réussite de son ouvrage, il quitta le pauvre quartier des Halles et vint se loger dans un agréable et confortable appartement au numéro 25 de la rue du Helder. Sa joie n'y fut pas de longue durée. C'est là qu'il devait éprouver de grandes, amères et cruelles déceptions. Quelques semaines changèrent son état d'âme. Un beau matin, alors que la première représentation de la Défense d'aimer était prochaine, le théâtre de la Renaissance fit faillite. Les fâcheux événements dont le noble ambitieux allait sentir toute l'amertume et tout le déboire prenaient commencement.

Pendant l'hiver de 1839 à 1840, Wagner, avide de cette renommée qu'avaient remportée avec leurs mélodies Schubert et Mme Loïsa Puget, rechercha la célébrité que donne la société aristocratique. Il mit en musique Dors mon Enfant, l'Attente de Victor Hugo, les Deux Grenadiers de Henri Heine et Mignonne de Ronsard, qui parut dans la Gazette musicale. Le but qu'il visait, il ne put l'atteindre : les Duprez et les Rubini, « ces héros du chant si vantés » (3), ces Capouls de l'époque, se soucièrent bien de révéler dans les salons mondains les compositions du naïf étranger! Du reste, cette musique n'était point faite pour les « bouches en cœur, bouches à roulades, à points d'orgue pâmés », comme dirait M. Emile de Saint-Auban.

(1) L'Œuvre et la Mission de ma Vie (traduction de M. Edmond Hippeau) Paris. Dentu, 1884, p. 41.
(2) Richard Wagner, Souvenirs (traduction de M. Camille Benoît) Paris, G. Charpentier et Cie, éditeurs, 1884. — p. 35.
(3) Souvenirs p. 37.

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