Aspects de la contrebasse solitaire - Conclusion - ConclusionConclusion > Conclusion
Conclusion
Jusqu'alors relégués au fond de l'orchestre, ou parfois solistes accompagnés
(pièces pour contrebasse et piano, ou pour contrebasse et orchestre),
contrebasse et contrebassiste affrontent à présent, seuls, la scène. Le
développement d'un répertoire pour contrebasse seule n'a pu être abordé sans
évoquer quelques aspects de son passé. Celui-ci révèle effectivement une
situation particulière. Instrument d'orchestre, la contrebasse parvient
difficilement avant le vingtième siècle à se détacher de considérations
malveillantes proférées à son égard. Quelques contrebassistes virtuoses ont su
convaincre un public surpris de découvrir les richesses de cet instrument
"d'orchestre". Cependant, il ne parvient pas à cette époque à s'imposer comme
instrument soliste. Le passé de la contrebasse à lui seul pourrait ainsi
justifier le désir de développer un répertoire pour contrebasse seule. D'autres
facteurs contribuent encore à la mise en place du répertoire pour instrument
seul.
L'effet sonore et l'effet théâtral se dégagent plus particulièrement de
l'exécution de pièces pour contrebasse seule. Ils résultent d'une démarche
compositionnelle, ou stimulent cette même démarche.
L'effet sonore provient avant tout d'une recherche constante de timbres
inouïs. Avant même de s'attacher à une exploration maximale des ressources
instrumentales, l'effet sonore original s'impose, parce que la contrebasse est
seule, écoutée pour elle-même. Puis de la recherche de sonorités nouvelles
découlent des modes de jeu divers , (du mode de jeu traditionnel au mode de jeu
extravagant). L'effet sonore est lié au geste qui l'accompagne. Cette prise de
conscience de la relation geste-son suggère deux démarches différentes : la
pensée d'un geste peut provoquer un son , la pensée d'un son peut induire un
geste. Dans ces deux processus, la sonorité est affectée. L'effet sonore résulte
encore du type d'écriture adopté : écriture polyphonique (exemple de l'effet
"d'amas sonore"), recherche de la profondeur du son... L'impact de l'effet
sonore est permanent.
L'effet théâtral peut être réellement recherché ou alors il peut s'imposer
comme une conséquence inévitable de l'écriture pour instrument seul. Dans les
deux cas, il résulte d'un investissement hors du commun de l'interprète. Ainsi,
la virtuosité "performance technique", caractéristique de la plupart des oeuvres
pour instrument seul, entraîne l'interprète aux confins de ses possibilités. De
cette sollicitation extrême découle une théâtralisation de la pièce. La fonction
de l'interprète s'élargit : le contrebassiste "traditionnel" devient lui même
source sonore, et acteur, par l'importance accordée à son geste. Cette nouvelle
forme d'investissement suscite encore l'effet théâtral.
Effet sonore et effet théâtral ont ainsi constitué deux directions dans notre
étude des oeuvres pour contrebasse seule, au détriment peut-être des aspects
spécifiques de chaque oeuvre : les séquences d'"harmoniques éthérées" de
Théraps de Xénakis , la construction parabolique de Episode huitième
de Betsy Jolas, les éléments purement musicaux d'Alice M. Finissy... sont
passées sous silence.
De même nous avons évoqué le répertoire pour contrebasse seule, comme témoin
d'un regain d'intérêt pour cet instrument. Cependant, cette littérature est loin
de constituer l'unique intérêt du répertoire. Pour une étude approfondie de la
situation de la contrebasse au vingtième siècle, il s'avérerait enrichissant de
considérer tous les genres de musique (musiques improvisées, musiques écrites),
et dans des formations les plus diverses.
- contrebasse et dispositif électronique, contrebasses électriques
- contrebasse, et ensembles instrumentaux. La contrebasse peut être soliste,
ou mêlée à d'autres instruments. A-t-elle alors une fonction particulière ?
- ensembles de contrebasses (Orchestre de contrebasses, Carré de basses,
oeuvres pour plusieurs contrebasses...)
Enfin, le comportement spécifique des contrebassistes (dynamisme, potentiel
créatif...)pourrait constituer un nouvel axe de recherche dans l'étude de la
situation de la contrebasse.
L'existence d'associations telles que l' International society of bassists
aux Etats-Unis, l'Association des contrebassistes de France, MC2 Octo-Bass, la
mise en place de festivals et de rencontres (Festival international de la
contrebasse, Rencontres internationales de contrebasses de Cap Breton),
l'illustrent admirablement.
1- Barry Guy, cité dans Xénakis. Théraps, Paris : Salabert, 1976,
notes pour l'interprétation.