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LA MUSIQUE ET LES MUSICIENS - CHAPITRE II — Le matériel sonore - De l'orchestration. Instruments d'emploi moderne. > CHAPITRE II — Le matériel sonore > De l'orchestration. Instruments d'emploi moderne.
Si donc à ce matériel orchestral classique on ajoute a présent, à titre de
hors-d'œuvre ou de condiments, quelques-uns des
instruments de notre deuxième
colonne, la richesse va encore s'accroître, et cela non pas absolument en
raison du nombre d'instruments ajoutés, mais plutôt en raison de la quantité de
timbres nouveaux qu'ils apporteront à l'ensemble.
L'adjonction de la petite flûte donnera du brillant, du mordant; mal employée,
elle communiquera à l'orchestre quelque trivialité.
Les trombones amènent avec eux l'idée de la pompe, de la majesté, dont ils ne
peuvent se départir.
(Ces deux instruments, petite flûte et trombone, sont les seuls, avec le
contrebasson, que Beethoven ait parfois introduits dans son orchestre
symphonique, avec une grande sobriété et en portant à quatre le nombre des
cors.)
Le cor anglais apporte sa note triste et pensive, poétique ; les clarinettes
alto ou basse, leur solennité quasi pontificale; le saxophone, son timbre
hybride, qui accapare l'attention au point que l'oreille le cherche et le suit
toujours dès qu'elle l'a entendu.
La harpe ne doit apparaître que lorsque son emploi est motivé par son double
caractère éthéré et hiératique ; en abuser, c'est en annihiler l'effet, qui est
des plus saisissants et des plus poétiques lorsqu'on sait le tenir en réserve
pour le moment opportun.
L'ophicléide (à présent tuba) est à considérer comme la basse des trois
trombones, dont il complète le quatuor en le renforçant par sa sonorité
monstrueuse.
L'emploi des cors et trompettes chromatiques (à pistons) enrichit
le groupe des cuivres en lui donnant une liberté d'allure toute nouvelle. Dans
les grands orchestres actuels, ce groupe comprend généralement :
2 trompettes à pistons;
4 cors à pistons;
3 trombones;
1 tuba;
dix exécutants, ce qui lui donne une belle étendue et uni» forte puissance.
Les cornets, bien qu'ayant été employés par des maîtres avant l'invention de la
trompette chromatique, doivent disparaître de l'orchestre symphonique, où leur
trivialité jette une note criarde, et se réserver pour la musique militaire,
dans laquelle leur rôle devient au contraire très important, et où ils sont à
leur vraie place. Dans un seul cas, ils peuvent acquérir une certaine noblesse;
c'est lorsqu'ils redoublent à l'octave aiguë un chant large confié à un autre
instrument de cuivre, le trombone par exemple.
Les instruments à percussion sans note déterminée, grosse-caisse, tambour,
tambourin, tambour de basque, etc., ne peuvent servir qu'à accentuer des
rythmes, en leur communiquant toutefois un certain caractère de convention; le
tambour fait penser à la caserne, la castagnette à l'Espagne, de même que le
tambour de basque et le tambourin nous conduisent aux Pyrénées; le
triangle
argentin appelle la gaieté, tandis que le tamtam est toujours lugubre.
Ce sont là des accessoires de mince importance, et qui ne peuvent être appelés
qu'à jouer un rôle secondaire, purement pittoresque.
Il faut considérer tout autrement les Jeux de timbres, dont le typophone est la
plus parfaite expression, et même le piano, qui pourraient fort bien un jour
appartenir normalement à la constitution de l'orchestre.
La guitare et la mandoline, instruments de sérénades; aussi bien que la
viole
d'amour, ne s'y sont jamais acclimatées et n'y ont apparu qu'épisodiquement, en
vue d'effets spéciaux.
Quant au grand orgue, qui apporte avec lui, tant de
puissance qu'en richesse de timbres, l'équivalent d'un deuxième corps d'armée,
soit qu'il dialogue avec les instruments symphoniques, soit qu'il ajoute ses
éléments à leurs combinaisons, il est toujours d'un magnifique et imposant
effet, tant à l'église qu'au théâtre, dans les scènes ayant caractère religieux,
ou encore dans l'oratorio.
L'usage de tous ces instruments-annexes ou tels
autres qu'on pourrait imaginer est des plus aisés pour quiconque sait manier
ceux qui forment la base même de l'orchestre, le quatuor, les bois et les
cuivres classiques; c'est donc ceux-là qu'on doit vraiment étudier. Il en est de
même de la réunion d'un chœur à l'orchestre; le choeur peut être traité comme on
écrit les voix lorsqu'il s'agit de simples leçons d'harmonie ou de
contrepoint, et former à lui seul un tout complet, auquel s'adjoint l'orchestre
soit pour en renforcer chacune des parties ou quelques-unes seulement, soit, ce
qui est plus fréquent, pour créer un réseau de broderies et dessins divers
enveloppant la trame chorale sans en déranger la marche. En ce cas, la masse
sonore totale peut être considérée comme contenant quatre groupes distincts :
Les chœurs;
Le quatuor;
Les bois;
Les cuivres ;
ayant chacun leur degré relatif d'importance.
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