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LA MUSIQUE ET LES MUSICIENS - CHAPITRE PREMIER - Étude du son musical - Transmission du son par l'air > CHAPITRE PREMIER - Étude du son musical > Transmission du son par l'air B. — Transmission du son par l'air.
Autour du point où le son est produit par l'un ou l'autre des procédés que
nous venons de décrire, les molécules d'air se trouvent déplacées et forcées
d'exécuter des mouvements de
va-et-vient absolument semblables à ceux du corps vibrant lui-même; dans ces
mouvements, elles viennent heurter les molécules contiguës, qu'elles obligent à
vibrer comme elles et à
transmettre à leurs voisines l'impulsion qu'elles ont reçue, et ainsi de suite.
Voilà comment le son se propage, non seulement dans l'air, mais dans tous les
milieux gazeux, liquides ou solides,
qui sont, tout comme lui, composés de molécules.
Il est très important de bien comprendre que l'air lui-même ne s'agite pas,
qu'il n'est pas transporté d'un point à un autre, sans quoi les sons
constitueraient de véritables courants d'air, et le
voisinage d'un instrument de musique serait dangereux pour les personnes
sujettes au rhume de cerveau. Chaque molécule se borne à reproduire exactement
le mouvement du corps vibrant
qui a causé l'excitation première, et revient au repos après l'avoir communiqué
à ses voisines, qui agissent de même, à leur tour, à l'égard des molécules
suivantes. C'est un mouvement
moléculaire.
Pour bien saisir cette transmission, je signale la démonstration suivante :
prenez cinq ou six pions d'un jeu de dames, et rangez-les à la suite les uns des
autres, à
plat et se touchant, sur le couvercle à rainure qui sert ordinairement à les
enfermer; séparez le dernier de la rangée, et lancez-le doucement, en le faisant
glisser horizontalement, contre son voisin; le mouvement se transmettra de
proche en proche jusqu'au dernier pion, qui seul, n'en ayant aucun autre devant lui à actionner, avancera de quelques
millimètres ou même
centimètres, selon la force de l'impulsion donnée.
Les autres n'auront pas bougé d'une façon appréciable ;
il n'auront fait chacun que le très petit mouvement nécessaire pour communiquer
la force à leurs voisins. Cette expérience se fait encore mieux avec une
série de billes d'ivoire,
telles que les billes de billard. C'est ainsi qu'agissent les molécules.
Disons en passant que la transmission se fait de la même manière pour les
vibrations lumineuses et calorifiques dont nous avons parlé au début, avec cette
différence que ces dernières sont
des phénomènes vibratoires atomiques, tandis que les vibrations sonores sont des
phénomènes moléculaires; l'atome est le dernier élément constitutif des corps,
les molécules sont des
agglomérations d'atomes, il est facile de concevoir que des vibrations qui se
chiffrent par trillions doivent affecter des parties infiniment plus petites que
les vibrations musicales.
L'onde sonore correspondant à une vibration et engendrée par elle se compose
donc, comme elle, d'une condensation et d'une dilatation successives. Quand la
première molécule s'en vient
pousser la deuxième, il y a entre elles condensation ; quand elle s'en retourne
à son point de repos, pendant que la deuxième se dirige vers
la troisième, elles s'écartent l'une de l'autre, il y a dilatation, tandis qu'à
ce même moment il y a condensation entre la deuxième et la troisième, etc. Ces
pulsations s'en vont ainsi propager le son à travers l'air, sans que lui-même soit déplacé ; et comme chacune d'elles
n'est que la reproduction, la copie, pour ainsi dire, de l'oscillation du corps
vibrant, elles s'en vont le
transportant partout, avec ses qualités d'intonation et de timbre. Quant à
l'intensité, elle va en décroissant; car toutes ces transmissions ne peuvent se
faire sans des frottements
moléculaires qui amoindrissent graduellement l'amplitude, jusqu'au point où elle
devient imperceptible, négligeable, puis nulle.
Nous verrons bientôt selon quelle loi, très simple, s'accomplit cette
déperdition d'intensité; mais auparavant, une nouvelle comparaison trouve ici sa
place utile, presque, indispensable.
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