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ARGOT MUSICAL - Ministérielle (Musique). > Ministérielle (Musique). Ministérielle (Musique). -- Nom donné aux charivaris offerts à un certain nombre
de députés et de fonctionnaires politiques sous le règne de Louis-Philippe.
Un de ces concerts, demeuré justement célèbre dans les fastes de la musique
ministérielle, fut donné par la ville d'Aix à son honorable député.
« En arrivant aux portes de la ville, raconte le biographe des contemporains, M.
Thiers est fort surpris de ne pas voir la foule enthousiaste se porter à sa
rencontre. Toutes les rues sont désertes; le sous-préfet seul et quelques
fonctionnaires se montrent autour de la voiture du petit député. Les cloches de
la cathédrale ne sont pas même en branle.
Il descend à l'hôtel, convaincu que la ville est morte ou qu'un démon jaloux de
sa gloire en a subitement endormi la population. Cette erreur ne dure pas. Du
bruit se fait entendre au dehors; il regarde et voit une masse considérable
d'hommes et de femmes qui se rassemblent sous sa fenêtre.
-- Bon, se dit-il, voici la sérénade.
En effet, mais quelle sérénade, juste
ciel! M. Thiers bondit de surprise et de frayeur au début de cet étrange
orchestre.
Les habitants de la ville, armés de pelles et de chaudrons, de casseroles et de
pincettes, se mirent à exécuter le plus abominable charivari que jamais oreille
humaine puisse entendre. Beaucoup d'entre eux s'étaient munis de cornets à
bouquin. D'autres, après avoir roulé devant la porte d'énormes tonneaux vides,
frappaient dessus à tour de bras avec des maillets monstrueux. C'était un orage
de cris, de hurlements, de sifflements.
Il fallut boire jusqu'à la lie cette coupe amère de l'affront et de l'injure.
Les cris et le vacarme, ajoute la biographie des hommes du jour, ne cessèrent
que par l'intervention de la force armée. M. Thiers s'échappa pour se rendre à
Marseille; mais le même accueil l'y attendait et les symphonies reprirent de
plus belle. »
(Voir Charivari.)
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